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Le monde de Francesca
29 avril 2013

Interview de Sylvia Day (2ème partie)

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Deuxième partie de l'interview avec Sylvia Day. Mes questions sont en bleu.

Comment organisez-vous votre travail, avez-vous écrit tous les livres en même temps ou écrivez-vous peu à peu votre histoire ?

J'ai écrit Bared to you seule, et je pensais qu'il n'y aurait que deux tomes, un pour Eva, un pour Gideon et ensuite terminé. Mais l'an dernier, toutes mes autres séries avec d'autres éditeurs ont été mises en stand by pour que je puisse écrire cette série d'une traite. Je ne sais pas où l'histoire se dirige avant de l'écrire, j'ai des amies qui ont de magnifiques tableaux, elles connaissent chaque scène de chaque chapitre, elles n'ont plus qu'à écrire. Moi je ne sais rien du tout. Et si j'essaie de planifier à l'avance, les personnages deviennent fous et je dis : "Mais qu'est-ce que vous avez fait ? Maintenant je ne peux pas écrire ce à quoi j'avais pensé !" Mais c'est ce qui est amusant pour moi, de découvrir l’histoire au fur et à mesure, en même temps que le lecteur en fait, parce que j'écris d'une traite.

Certaines personnes écrivent différentes scènes ou chapitres. Moi je commence à la page 1 et j'écris en continu jusqu'à la fin. L'histoire semble s'ouvrir en même temps que je l'écris, c'est la raison pour laquelle je ne pouvais pas dire combien de livres il y aurait. Je n'en sais rien jusqu'à ce que j'aie terminé.

Mais en fait Bared to you démarre en juin, et Entwined with you en août, il se passe juste deux mois, s'il m'a fallu trois livres pour parcourir deux mois, combien de tomes ça va me prendre pour arriver jusqu’au moment où il sera raisonnablement possible pour ces deux personnes d'être vraiment bien ensemble ? Je ne le sais pas, je ne peux répondre à cette question. Mon amie pourrait, elle a toute l'intrigue prête.

Est-ce que vos autres romances sont dans le même genre ou écrivez-vous des choses plus fleur bleue, avec moins de scènes de sexe ?

La plupart de mes romans sont de la romance érotique. J'ai une série d'Urban fantasy sous le nom de SJ Day, qui est sexy, mais ce n'est pas de la romance traditionnelle, il y a deux héros et une héroïne. Je les écris sous un pseudonyme parce que les lectrices s'attendent à ce qu'un livre de Sylvia Day se termine sur un happy end, ce que je ne peux garantir avec ces livres.

J'écris dans plusieurs genres, et je suis vraiment heureuse de pouvoir le faire, certains auteurs ne le peuvent pas. Mais j’ai tellement d'éditeurs, douze en ce moment, sans compter les trente-neuf autres à l'international. Je peux trouver un éditeur pour n'importe quel roman. J'aime écrire du paranormal, de la romance historique, mais tous mes livres sont sexy. Parce qu'en ce qui me concerne, j'ai du mal à tomber amoureuse d'un héros s'il n'est pas doué au lit, et c'est dur pour moi de le considérer comme un mâle alpha s'il n'a pas envie de vous jeter sur le lit et de s'imposer à vous. Tous mes héros ont ce côté un peu animal, parce que moi-même je trouve ça attirant.

Ecrivez-vous des romances historiques ?

Oui, à l'époque Georgienne et sous la Régence. J'ai lu va les publier en français. J'ai commencé par la romance historique, mon premier livre était une romance historique. J'en ai écrit neuf. Et puis en avançant, je me suis rendu compte que la chose la plus importante était l'histoire que j'essayais de raconter. Parfois elle allait avec l'époque historique, parfois elle était plus contemporaine ou paranormale. Je me suis dit : ne te soucie pas du contexte, trouve d'abord l'histoire, la romance, et ensuite l'endroit où la situer, en te demandant à quelle époque cette romance aurait vraiment rencontré des obstacles. Ensuite écris-la. Parce qu'on veut que ce soit difficile, on veut qu'ils aient à se battre.

Je suis contente qu'elles soient traduites en français, j'espère que vous les aimerez. La première qui sera traduite est celle qui m'a inspiré Bared to you, donc quand vous la lirez vous verrez que c'est un peu la version historique de Bared to you.

C'est une série de combien de livres ?

Seven years to sin est un livre unique. Quand je l'écrivais, j'étais environ aux trois quarts lorsque je me suis aperçue que je ne pouvais pas rendre justice au fait que cette femme ait été abusée dans son enfance, il n'y avait pas assez de place, c'était un seul livre, et à ce moment-là j'avais presque fini, j'avais une date limite à respecter, je ne pouvais pas essayer de tout réécrire et ce n'est pas quelque chose d'habituel dans la romance d'avoir le même couple sur plusieurs livres. Quand les auteurs écrivent des séries, il y a des couples différents dans chaque livre. J'ai donc réalisé que je ne pouvais rien faire avec cette histoire, ça m'ennuyait, ce n'était pas la première fois que j'avais un personnage qui avait subi des violences, certains auteurs ont des thèmes récurrents, c'est l'un des miens, le fait de surmonter un passé dramatique. Après toutes ces années passées à écrire, je me suis dit : je veux vraiment rendre justice à cette histoire. Alors j'ai, au départ, simplement transposé ces personnages, Jessica et Alistair, dans le New York actuel, parce que c'était là que j'avais vu ce superbe spécimen dans la rue. Et puis ils sont devenus eux-mêmes après que j'ai commencé à écrire leur histoire. Au début ils étaient cet autre couple, et puis ils sont devenus eux. Alors quand vous lirez ce livre, vous verrez qu'ils se ressemblent : Jessica est blonde aux yeux gris, Alistair a de longs cheveux noirs et les yeux bleus. Vous verrez en le lisant. Dans Bared to you il y a la robe rouge dans la limousine, dans Seven years to sin c'est une robe rouge dans un carrosse. Donc vous remarquerez des similitudes.

Etant donné que vous êtes fan de la série Eve Dallas et qu'il y a des éléments de thriller dans le second tome, est-ce que vous auriez envie d'écrire du romantic suspense ?

Beaucoup de mes romances paranormales sont comme ça. Je ne l'ai pas fait en contemporain, mais en paranormal et en Urban Fantasy, il y a beaucoup de suspense, d'éléments de thriller et de policier.

Vous avez dédié votre second tome à Nora Roberts, est-ce qu'il y a d'autres auteurs de romance que vous aimez ?

Oui, il y en a pas mal. J'adore Lisa Kleypas, Nalini Singh, Patricia Briggs. Je sais ce que c'est que d'attendre que leur prochain livre sorte.

Vous avez le temps de lire ?

Il faut que je lise. J'ai eu une période d'environ trois ans où je lisais de moins en moins parce que je me sentais coupable, j'avais des dates à respecter, des livres à écrire, je n'avais pas le temps de lire. Et mon écriture s'est dégradée, j'en suis arrivée à un point où je n'ai pas pu écrire pendant neuf mois, je ne faisais que regarder mon écran. J'ai appelé mon éditrice et je lui ai dit : "Peut-être que je suis finie, peut-être que j'ai écrit toutes les histoires que j'avais en moi". Et elle m'a répondu : "Non, fais une pause, tu as travaillé toutes ces années, écrit tous ces livres. Fais une pause, regarde un film, lis des livres, passe du temps avec tes enfants, fais autre chose, recharge tes batteries, tu es à plat".

Alors j'ai lu un livre en entier, ce que je ne faisais plus : je survolais. S'il y avait une romance secondaire je la sautais, j'arrivais à la fin et l'héroïne disait "Ah, tu as trouvé mon chien !" et moi je pensais : "Mais quel chien ?" On n'apprécie plus l'histoire quand on en est là, on perd tout. Alors quand j'ai lu un roman en entier, j'ai trouvé ça super. J'en ai lu un autre et encore un autre, sur quinze jours j'ai lu des dizaines de livres, avec voracité, et quand j'arrivais à la fin de l'un je me disais : c'était formidable. Vous savez, vous avez la charge émotionnelle de ce que vous venez de lire, et je me suis souvenu que c'était la raison pour laquelle j'avais commencé à écrire. J'avais lu ma première romance, et arrivée à la fin je m'étais dit : je veux faire en sorte que d'autres personnes ressentent la même chose. Mais j'avais perdu ça en arrêtant de lire. Alors maintenant c'est une priorité, peu importe que j'aie une date à respecter, si je veux lire un livre, s'il y en a un qui m'intéresse, c'est mon droit. Donc ça ne me retarde pas, mais j'ai dû apprendre cette leçon à la dure.

Et quelle était la première romance que vous avez lue ?

C'était Desert hostage de Diane Dunaway, elle a écrit deux livres, c'est tout. C'était dans les années 80, c'est l'histoire d'un cheikh qui kidnappe l’héroïne et la viole dans le désert. Honnêtement, je l'ai racheté sur eBay plus tard, parce que c'était le livre qui m'avait donné le goût de la lecture. Je l'ai lu, et je me suis dit : "Oh mon dieu, mais c'est horrible, je n'arrive pas à y croire ! " A cette époque, c'était comme ça qu'on écrivait la romance, ce n'était pas étrange. Maintenant on est tellement branché sur les droits des femmes que ce genre de livre ne passe plus, et en fait ma mère m'avait donné ce livre en me disant : "Je veux que tu trouves un homme comme ça !" Aussi quand je l'ai racheté sur eBay, je lui ai dit : "Eh maman, tu te souviens de ce livre ?" Quand elle l'a relu elle m'a dit aussi : "Oh mon dieu, mais c'était terrible !" Et je lui ai rappelé : "Tu voulais que j'épouse ce type !" Elle m'a dit : "Non, c'est pas vrai !" Il était à moitié duc et à moitié cheikh, c'était juste dingue. Je l'ai terminé et je me suis dit : je veux écrire des livres, je veux que les gens les terminent et aient envie de les reprendre depuis le début. Ca a vraiment été le catalyseur pour moi.

Avez-vous toujours voulu écrire ?

Depuis mes douze ans.

En tant que présidente des RWA (Romance Writers of America), comment faites-vous connaître la romance aux USA, parce qu'en France elle n'est pas vraiment reconnue ?

Parce que nous sommes une association à but non lucratif, nous n'avons pas le droit de faire de la promotion, ce que nous pouvons faire c'est éduquer et nous travaillons d'abord avec les auteurs, pour leur expliquer quel type de produit proposer, et aussi avec les médias, pour qu'ils les présentent de la meilleure façon possible. Même si la romance représente 50% du marché aux USA, elle n'est pas considérée comme de la littérature : n'importe qui peut en écrire, vous savez, un auteur accompli n'en écrirait pas, les auteurs ne sont pas terribles. Aussi un de nos objectifs est de présenter les auteurs de romance comme des conteuses accomplies. C'est difficile, mais nous y travaillons.

Nous avons 10 000 membres, et c'est incroyable le nombre de celles qui possèdent un doctorat, sont avocats, ingénieurs, nous avons des scientifiques. Je crois que c'est la raison pour laquelle il y a tant de livres dont les héroïnes sont intelligentes, exercent des métiers variés, parce que les femmes qui les écrivent ont fait des études.

Le monsieur (NDLT : Stephan Marsan) disait hier que ça représente moins de 5% du marché. C'est 50% aux USA, mais bien que ce soit le plus large segment de l'édition, la romance est toujours méprisée, elle n'est pas considérée comme de la véritable littérature. Nous avons 10 000 membres, c'est une grosse organisation, ça donne l'impression que n'importe qui peut écrire de la romance, qu'on n'a pas besoin de compétences particulières. La raison pour laquelle j'en suis la présidente est que c'est un moment formidable pour être écrivain, l'auto-publication est une extraordinaire opportunité et de nombreux livres qui n'auraient pas trouvé d’éditeur peuvent quand même être mis à la disposition des lectrices. Ce qui est bien c'est que ce sont les lectrices qui disent ce qu'elles ont envie de lire, avant c'étaient les éditeurs qui disaient : "Oh, ça, ça va bien se vendre. Qu'est-ce qu'ils en savaient ?"

L'édition est l'une des rares industries où l'on ne fait pas de sondages auprès des consommateurs. Vous allez au supermarché et on vous demande : "Vous aimez ces céréales ?" Toutes les autres industries testent les goûts des consommateurs pour découvrir ce qu'ils veulent. Les éditeurs ne le font pas. Ils vous disent ce que vous avez envie de lire. L'auto-publication a rendu possible, pour les lecteurs, de dire : "Je ne veux pas acheter ça". Ce transfert du pouvoir, de l'éditeur au lecteur, permet une relation directe entre auteur et lecteur. Autrefois il y avait l'éditeur, l'auteur d'un côté et les lecteurs de l'autre, et il y avait ce mur qui n'est plus là maintenant.

Pour moi, en tant qu'auteur et présidente d'une association d'écrivains, c'est une période excitante et les auteurs ont beaucoup plus de pouvoir maintenant, parce que si votre éditeur dit : "Je ne veux pas publier cela", ce qui était ma crainte pour Bared to you, d'avoir à retirer tout ce qui faisait l'originalité de l'histoire, vous la proposez aux lecteurs et ce sont eux qui diront : "J'aime ça, c'est ce que je veux lire".

Pensez-vous que l'auto-publication soit l'avenir de l'édition ?

Non, en fait ce qu'il se passe en ce moment c'est que les éditeurs regardent les livres auto-publiés qui se vendent le mieux, les achètent et les publient. Mais c'est expérimental, ils vendent les livres trop chers, ils paient des millions pour un livre qui se plante dès que l'éditeur le prend en main. Parce que le prix est trop élevé, ou qu’ils n'ont pas fait leur travail d'édition. Ce qui était correct à 2.99 $ ne l'est plus à 9.99$.

Alors ils apprennent de leurs erreurs, certains tentent des prix plus bas. Mais au final, ce qu'ils doivent faire c'est contenter l'auteur. Parce que l'auteur a la possibilité de publier lui-même. Aussi maintenant l'éditeur doit-il dire : "Voilà ma valeur ajoutée pour vous... je vais faire une super couverture, je vais faire une superbe campagne de publicité, je vais contacter les libraires et les bibliothèques". C'est comme si au lieu de vendre aux lecteurs ils vendaient aux auteurs. L'avantage c'est qu'on va voir un changement, parce que quand les lecteurs vont dire : "C'est ce que j'ai envie de lire", les éditeurs vont penser : "Voilà comment on va le présenter à l'auteur".

Les ventes de livres augmentent, les gens lisent, je pense que tout va changer, c’est excitant. Les gens me demandent : "Pourquoi être présidente à un moment où vous êtes tellement occupée ?" Je réponds : "C'est parce que c'est énorme. C'est un moment merveilleux pour lire et pour écrire, c'est un moment merveilleux pour les livres".

Si on vous avait dit il y a quelques années que vous auriez autant de succès, quelle aurait été votre réaction ?

Je n'y aurais pas cru, on l'espère en tant qu'auteur, on aimerait peut-être apparaitre dans la liste des best-sellers du New York Times, on n'espère même pas être numéro un, parce que ça n'arrive jamais pour la plupart des auteurs, et simplement entrer sur la liste est quelque chose d'énorme et d'excitant. Se retrouver à la première place dans le monde entier, c'est juste fou, j’en suis encore surprise. Le roman est numéro un en Slovénie, qui l’aurait cru ? En Bulgarie, ça ressemble à une blague !

Et si on vous avait dit que vous seriez présidente des RWA ?

J'aurais dit : Vous êtes fou ! Et en fait quand on me l'a demandé, il a fallu neuf mois pour me convaincre, parce qu'il y a forcément quelqu'un de plus qualifié, c'est ce que j'ai répondu, il y a quelqu'un qui serait meilleur que moi pour ce poste, trouvez une personne qui le ferait mieux que moi. C'est quelque chose qui me passionne, et finalement ça m'a apporté beaucoup, le comité directeur est composé de plein d’auteurs formidables, de femmes très intelligentes, et donc j'apprends beaucoup grâce à cette expérience. Mais ma première réaction a été : non, non, s'il vous plait.

Et vous êtes présidente pour combien de temps ?

Jusqu'en novembre, un an. Il y avait autrefois un mandat de trois ans, mais ils disent qu'à partir de la seconde année, la présidente devenait folle. Une année c'est suffisant. C'est une formidable organisation, ils ont vraiment fait des choses superbes pour encourager les auteurs. Et puis dix voix ont plus de pouvoir qu'une seule.

Est-ce qu'il y a des hommes qui écrivent de la romance ?

Oui, nous avons des hommes, il y a aussi eu un président. C'est là où se trouve l'argent aux USA, si vous écrivez du policier, du thriller, vous ne gagnez pas autant, si vous voulez en vivre, il vaut mieux écrire de la romance. La liste des dix best-sellers de l'année 2012 comportait Crossfire, Fifty shades et The Hunger Games, des femmes qui écrivent des histoires ayant des éléments romantiques. Je veux dire, c'est super d'être un auteur féminin.

Que pensez-vous de la trilogie Fifty shades et de son succès international ?

Je pense que c'est super, ça a amené beaucoup de gens à la lecture. J'ai reçu des tonnes d'emails de lecteurs qui disaient : "Je n'ai pas lu un seul livre depuis le lycée, à part Fifty shades et Crossfire". Maintenant ils lisent, ils lisent beaucoup, ils achètent des livres, des bibliographies entières d'auteurs. C'étaient des gens qui n'étaient pas lecteurs, ou ne s'identifiaient pas en tant que tels. Plus de femmes lisent des histoires dont les héroïnes sont puissantes et pleines de confiance en elles. Et ce que je trouve super, c'est que dans beaucoup de nouvelles publications, il s'agit de femmes qui vont à l’université, comme dans le nouveau genre New Adult. Quel message ça envoie aux femmes concernant l'éducation, le fait d'avoir un bon travail ! C'est vraiment ça qu’a lancé la tendance Fifty shades. Alors je pense que c'est énorme. Ca a ouvert de nouveaux horizons dans beaucoup de pays. Crossfire est publié dans 39 pays, beaucoup d'éditeurs ont réalisé qu'il y avait un marché pour ce genre de livre. Pas seulement les romans érotiques, mais des livres où les femmes sont en position de pouvoir, avec leurs hauts et leurs bas, leurs luttes. Ca a changé l'industrie d'une façon vraiment formidable.

Est-ce que vous pensez que la romance érotique comme Crossfire et Fifty shades doit comporter du SM ?

Non, ce n'est pas ce que j'écris. Je n'écris pas de BDSM. Je ne pense pas que ce soit un passage obligé du tout. Si vous me demandez de décrire mes livres je dirais que c'est un homme et une femme, qui utilisent les instruments que Dieu leur a donnés. Il n'y a pas de vibromasseurs, pas de godemichés. Non qu'ils n'aient pas leur place, il y a de très bons livres avec ces éléments, mais je n'en écris pas, parce que pour moi la raison pour laquelle ils font l'amour est la connexion émotionnelle, et ce genre de gadgets ne fait que détourner l'attention, pour moi, en tant qu'auteur. D'autres font un travail phénoménal en incluant ces éléments dans leurs romans.

Alors non, je ne pense pas que ce soit indispensable. Certaines personnes font une confusion, parce que Gideon est dominateur, mais il n'est pas sadique. Concernant ce couple, ils ont souffert dans leurs relations sexuelles antérieures, il est impossible qu'il y ait de la souffrance avec la personne qu'ils aiment. Mais les gens mélangent BDSM et relation avec héros dominateur. Et il y a des tonnes de romances érotiques, j’en écris depuis dix ans. Il y a des tas d’auteurs qui en écrivent et il y a des choses très bien.

Avec le succès de Fifty shades, il y a beaucoup d'éditeurs qui mélangent Erotica et Romantica.

Oui, c'est ça, et quand un éditeur publie un livre érotique et dit "Si vous avez aimé Fifty shades vous aimerez ce livre", que vous le lisez et que c'est de l'Erotica, c'est très décevant. Et peut-être que la personne n'aura pas envie d'essayer autre chose. Elle va penser "Peut-être que Fifty shades était le seul, peut-être qu'il n'y en a pas d'autres, parce que ça, ce n'est pas ce dont j'avais envie". Par exemple la trilogie de la Belle au bois dormant d'Anne Rice n'a rien à voir avec la romance. Je ne peux pas croire qu’on puisse dire : si vous avez aimé Fifty shades, vous aimerez cela, non ! Mais ce sont les éditeurs, ils veulent faire du marketing. La seule chose que nous puissions faire en tant qu'auteur c'est essayer d'expliquer aux lecteurs ce qu'ils peuvent lire et il y a les recommandations des autres lecteurs, les blogs, c’est vraiment utile de lire une opinion honnête sur ce qu'il faut lire ou éviter, ce qu'on pourrait aimer ou détester.

Et puis il faut trouver des auteurs qui écrivent ce qu'on aime et leur rester fidèle parce qu’on sait qu’ils vont proposer ce qu’on recherche. C’est dommage, mais c’est typique.

Aux USA, quand Bared to you et Fifty shades sont sortis, le même jour, ils ont eu tellement de succès que les éditeurs se sont mis à changer leurs couvertures pour faire ressembler leurs romans à ces deux-là, et les lectrices ont pu être déçues. Heureusement la romance représente 50% du marché aux USA, et il y a déjà un grand nombre de bloggeuses qui ont pu prévenir : "Ce n'est pas ce que vous recherchez, essayez plutôt Bared to you".

Parfois, on entend dire que la romance n'est qu'un ensemble de fantasmes qui déconnecte le lecteur de la réalité et empêche de vivre.

J'ai entendu dire ça, et des thérapeutes disent que ce n'est pas une bonne tendance et puis vous avez cette étiquette "mommy porn". Au fil du temps, on a découvert que lorsque les hommes regardaient de la pornographie, ils faisaient une dissociation et ça devenait difficile pour eux de ressentir de l'excitation sexuelle sans pornographie parce qu'ils passaient beaucoup de temps à en regarder tout seuls et devaient en visionner pour pouvoir faire l'amour. Je crois que beaucoup de gens cherchent à trouver comment la littérature érotique pour femme entre là-dedans et suit le même schéma. Mais ce qu'on a découvert au contraire c'est que les femmes, quand elles sont excitées, se tournent vers leur partenaire, et j'ai des maris qui m'ont dit : "Ma femme me saute tout le temps dessus et j'adore ça".

Parce que nous avons une réaction tout à fait différente, nous n'avons pas envie de dissocier et de nous enfermer dans une chambre pour faire notre petite affaire nous-mêmes, c'est une réaction très différente. Je n’arrête pas d'entendre dire par des lectrices : "Merci, moi et mon mari n'avions pas eu de si bons rapports depuis des années", et puis il y en a qui disent : "Je n'ai pas envie d'aller vers mon mari, parce que j'ai trop de plaisir en lisant ce livre". Mais si nous sommes excitées sexuellement et que nous sommes en couple, nous allons vers notre partenaire.

Pourquoi le modèle masculin est toujours idéalisé dans la romance américaine ?

Je ne dirais pas que Gideon est l’homme idéal, il est assez tordu. Je ne suis pas sûre que beaucoup d'entre nous serait à l'aise si elles dormaient dans le même lit qu'un homme dont il émane une telle aura de danger. Par certains côtés il est idéal, par d’autres pas du tout. Je pense que la plupart du temps, les héros de romance doivent avoir des défauts, sinon on ne pourrait pas les aimer. Vous savez, on ne peut aimer la perfection. C'est très difficile. Ce qu'on aime, c'est quelqu'un qui se bat pour devenir meilleur. Mais pour avoir envie de s'améliorer, il faut qu'il ne soit pas si parfait que ça.

Je pense qu'une des raisons pour lesquelles les héros ont tendance à être riches, c'est que s'ils ne le sont pas, ça pose toutes sortes de problèmes qui détournent de la romance. Par exemple si vous vous battez pour payer vos factures... Alors les auteurs ôtent cela de l'équation pour pouvoir se concentrer sur deux personnes qui essaient de bâtir une relation. Et puis bien sûr il y a le côté fantasme de la romance.

Mais j’ai souvent entendu des hommes me dire : "Je ne savais pas si j'allais le lire, mon collègue de travail me l'a donné, ou ma femme, ma petite amie, me l'a donné, et le gars est riche, beau et doué au lit. Mais qui c'est ce type ? Et puis quand je suis entré dans le livre, je me suis rendu compte qu'il avait vraiment des problèmes, j’ai commence à comprendre : c'est un inadapté social, il est nul pour parler aux gens, il passe pour impoli et agressif parce qu'il ne sait pas se comporter avec les autres. Il n'a pas de relation amoureuse ni de petite amie, donc finalement je l'ai trouvé très sympathique, je peux comprendre ce type parce que j'ai moi aussi du mal à parler aux filles."

Vous savez, il s'agit de trouver le bon équilibre entre le fantasme et suffisamment de réalisme pour qu'on puisse tomber amoureuse. On tombe amoureuse de Gideon parce qu'il a des problèmes, vraiment, c'est la raison pour laquelle on l'aime.

Certaines personnes disent que la romance rend les femmes plus exigeantes par rapport aux hommes de leur vie.

Vous savez je suis mariée, mon mari ne ressemble absolument pas à Gideon Cross et je ne le considère pas différemment, il n'est pas amoindri à mes yeux parce qu'il n'est pas l'un de mes héros de romance, parce que je ne pense pas qu'on tombe amoureuse d'un idéal, nous tombons amoureuses de leurs défauts, nous tombons amoureuses de ce qui ne va pas chez eux et de la façon dont ils cherchent à s'améliorer. Et je crois que c'est pareil dans les romances. Si vous lisiez un livre dont le héros est parfait et idéal, vous diriez : ce type est tellement parfait, personne ne peut être comme ça. On ne ressentirait pas de connexion avec lui, il ne nous intéresserait pas. Malheureusement on ne parle pas de ses défauts, seulement du fait qu’il est beau et riche, mais ce n’est pas la réalité. C'est une question d'information, il faut expliquer aux media et aux autres lecteurs qu'ils se font des idées fausses, et il y en a beaucoup. Je n'ai jamais entendu une femme dire : "Je n'ai pas le moindre désir d'être avec un homme parce que j’ai mes romances".

J'ai lu quelque part qu'on utilisait des romances dans des centres pour femmes battues pour leur apprendre ce qu'une relation doit être, et ce qu'on ne doit pas accepter.

En fait, c'est la raison pour laquelle ma maman m'a fait lire des romances. Elle disait : "Je veux que tu saches ce que tu devrais ressentir quand tu es dans une relation amoureuse, pas nécessairement que c’est lui le bon, mais tu devrais être excitée, sentir qu'il prend soin de toi et t'accorde son attention". C'est une chose que les jeunes femmes devraient savoir. Et j'apprécie tout spécialement que dans les romans récents, les héroïnes aient fait des études, c'est un super message, je trouve, que nous faisons passer aux femmes : devenez d'abord une personne accomplie, et ensuite cherchez une relation amoureuse. J'aime vraiment la direction que prend la romance.

Est-ce que c'est la première fois que vous venez à Paris ?

Oui.

Et vous êtes contente d'être en France ?

C'est formidable. Et je me rends compte, j'ai été à la Nouvelle Orléans, en Louisiane, et ils reprennent beaucoup de choses françaises. Dans le stylisme, le design, et puis il y a le French Quarter (Quartier français) et en marchant dans Montmartre ce matin, j'ai vu qu'ils avaient copié toutes ces petites fenêtres avec des rideaux, mais il n'y a pas le même sens du style, et c'est vraiment différent de le voir en vrai. Nous étions assis dans un café et je regardais autour de moi en me disant : c'est trop cool, c'est la même chose en vrai, plutôt que les miniatures que nous avons chez nous. Alors oui, j'en suis tombée amoureuse. Je trouve que c'est très beau.

Encore un grand merci à Sylvia Day qui a un discours vraiment très intéressant, à J'ai Lu pour avoir permis cette belle rencontre, et aux Romantiques pour le superbe travail !

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Commentaires
C
On est sacrément en retard en France, 50% du marché , wahou, et malheureusement toujours autant sous estimé, c est vraiment super ses auteurs qui se battent pour être reconnus, surtout que c' est mérité!
Répondre
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